Plus d’un an après l’entrée en vigueur de la réforme repoussant l’âge légal de la retraite à 64 ans, le dossier de l’emploi des seniors reste un chantier inachevé. En France, seuls 58,4 % des 55-64 ans occupaient un emploi en 2023, un taux nettement inférieur à celui de nombreux voisins européens. Si tout le monde s’accorde sur la nécessité d’agir, les mesures concrètes peinent encore à se matérialiser.
Alors que les discussions sur l’emploi des seniors s’étaient intensifiées après l’échec du Pacte de la vie au travail en avril dernier, un compromis a finalement été trouvé jeudi 14 novembre, après plusieurs semaines de négociations. Ce projet d’accord, intitulé Accord national interprofessionnel en faveur de l’emploi des salariés expérimentés, doit désormais être validé par les instances dirigeantes des différentes organisations, qui se prononceront avant la fin du mois de novembre 2024.
Lors des négociations, une proposition phare a refait surface : le CDI senior, nouvellement renommé Contrat de valorisation de l’expérience (CVE).
Le CDI senior, qu’est-ce que c’est ?
L’emploi des seniors répond à une double problématique : favoriser l’embauche tout en sécurisant le maintien en poste. Le CDI senior est un dispositif proposé par le patronat, qui cible les demandeurs d’emploi âgés d’au moins 60 ans, inscrits au chômage depuis six mois ou plus. Il permettrait aux seniors de continuer à travailler à taux plein jusqu’à la retraite sans craindre de licenciement – à l’exception des motifs légaux. De leur côté, les employeurs pourraient bénéficier de diverses aides financières pour recruter des travailleurs expérimentés.
Cette mesure, abandonnée au printemps dernier, refait surface dans un contexte où plus de 30 % des actifs ont dépassé les 50 ans, un chiffre qui pourrait atteindre 40 % en 2050.
Qui pourrait en bénéficier ?
Le CVE présente des bénéfices potentiels pour les deux parties concernées : les salariés et les employeurs.
Pour les salariés, le dispositif offre une sécurité accrue en garantissant un emploi à temps plein jusqu’à la retraite. Le CVE introduit également davantage de flexibilité sur l’organisation du temps de travail, avec la possibilité d’adapter les horaires et d’accéder à plus de formations. Parmi les mesures phares, la retraite progressive permet de travailler à temps partiel tout en touchant une partie de sa pension. L’accès sera désormais possible dès 60 ans, soit quatre ans avant l’âge légal de départ à la retraite fixé par la réforme de 2023.
Du côté des employeurs, le CVE allège les charges grâce à des aides ou des réductions de cotisations sociales, rendant l’embauche de seniors plus attractive financièrement.
Le texte prévoit également une négociation obligatoire tous les trois ans sur l’emploi des seniors dans les branches professionnelles et les entreprises de 300 salariés ou plus. L’entretien professionnel à partir de 45 ans est renforcé. Une nouvelle étape est introduite : un rendez-vous dans les deux années précédant les 60 ans pour discuter des conditions de maintien en emploi.
Parmi les critiques, la mesure suscite des préoccupations liées à la discrimination et à la confidentialité. Les entreprises pourraient être tentées de favoriser l’embauche d’employés âgés de plus de 60 ans pour bénéficier des allègements de charges, au détriment d’autres candidats. De leur côté, les salariés pourraient être amenés à divulguer des informations personnelles pour prouver leur éligibilité. Enfin, bien qu’il soit présenté comme un contrat à durée indéterminée, la fixation d’une échéance remet en question cette qualification.
Où en sont les négociations ?
De nouveaux échanges sont prévus pour jeudi 28 novembre. Si le texte est adopté, son application sera soumise à une phase de test, et son adoption définitive dépendra des résultats observés durant cette période. Actuellement, le projet d’accord est soumis à la signature des organisations patronales et syndicales.