Réunis jeudi 29 juin 2023 à l’initiative du Club Landoy et de la députée Astrid Panosyan-Bouvet, sous le haut patronage de la Présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, économistes, syndicalistes, chefs d’entreprises et députés ont apporté leur expertise et confronté leurs propositions pour tenter de répondre à l’aspiration des citoyens – toutes générations confondues – de réinventer leur rapport au travail tout au long de la vie. Sous l’intitulé « Préparer les transitions. Quel travail voulons-nous aujourd’hui et demain ? », la journée-débat a été riche en enseignements.
Une nouvelle vision du travail tout au long de la vie
Avec l’allongement de la durée de la vie, les tensions nouvelles sur le marché de l’emploi, l’irruption de l’intelligence artificielle, c’est tout le sens et l’acceptabilité du travail au cours de la vie qui est brutalement réinterrogé aujourd’hui. Au cœur des questionnements : la place des seniors dans l’entreprise, leur maintien ou retour dans l’emploi et, plus largement, la reconnaissance de leur importance grandissante et de leurs attentes dans la société, y compris active.
Le travail, à quel prix ?
C’est une singularité française en Europe, dont s’accommodent jusqu’ici sans le dire entreprises, pouvoirs publics et même salariés : les seniors sont retranchés du monde du travail très tôt, avec un sur trois seulement encore en activité professionnelle entre 59 et 64 ans. Entre l’emploi et la retraite, chômage, inactivité, engagements personnels ou associatifs sont au rendez-vous. Le modèle est aujourd’hui en bout de course, bousculé par les réalités démographiques, les contraintes économiques et les attentes sociétales.
Réinventer le travail, le rendre à nouveau désirable, sinon acceptable ? Oui, mais comment ? Si la question des salaires, de la juste rétribution des efforts fournis – tout particulièrement dans les métiers dits « invisibles » – et d’un meilleur partage de la valeur reste en haut de la pile des priorités, il apparaît maintenant évident que la façon d’être accompagné tout au long de sa carrière dans les entreprises est un levier crucial de changement de rapport au travail. Dans un monde en pleine évolution, où les connaissances et les compétences deviennent obsolètes sitôt mises en œuvre, dans un monde où la carrière ne se déroulera plus de façon linéaire au sein d’une seule et même entreprise, le « collaborateur » devient une denrée précieuse qu’il faut désormais considérer dans son entièreté, voire son intimité. Maîtres-mots de cette transition nécessaire : écoute, autonomisation, responsabilisation, partage d’expérience, formation au long cours, voisinage dans les moments de la vie, comme l’aidance d’un proche, un accident de santé, des engagements personnels importants…
Le temps du simple échange de services – force de travail vs salaire – est probablement définitivement révolu, ce qu’a résumé de façon éclairante la députée Astrid Panosyan-Bouvet en conclusion de la journée-débat : « Ce qui est en jeu à travers le travail, c’est de pouvoir choisir sa vie. »
Si inciter au maintien des seniors dans l’emploi par des politiques publiques ou des accords entre partenaires sociaux peut permettre de répondre au défi démographique posé à l’économie française, seule une réflexion de fond sur le sens du travail donné par les citoyens est à même de lui redonner toute sa valeur pour demain.